Avant de lire cet article, une précision importante :
Chez les créateurs et créatrices, il existe plusieurs types de missions.
Parfois, on fabrique une tenue à partir d’un croquis fourni, avec des indications précises sur les matières, les coupes, les détails. Dans ce cas-là, on est ce qu’on appelle une “petite main” — on réalise, on exécute, on sublime un projet imaginé par quelqu’un d’autre. Et dans ces situations, la paternité de l’œuvre revient légitimement au styliste qui a conçu l’idée.
Mais ce n’est pas du tout ce dont il est question ici.
Dans l’histoire qui suit, la prestataire a tout imaginé : les croquis, les volumes, les matières, les finitions. Le client s’est contenté de dire : “ok, ça me va”… et s’est ensuite approprié l’œuvre comme si elle venait de lui. Ce n’est pas une collaboration. Ce n’est pas de l’exécution.
C’est une usurpation. Un vol de création. Et c’est pour cela qu’on en parle.
Ce que vous allez lire n’est pas une fiction. C’est une histoire vraie, et malheureusement, pas si rare dans le monde de la création. Elle concerne Victoire Jolie (prénom d’emprunt), Maître artisan d’art, styliste-modéliste, costumière et habilleuse. Une professionnelle accomplie, reconnue, passionnée. Une femme dont le métier est de transformer les idées en œuvres textiles, avec une exigence de haute couture.
Et pourtant, malgré son statut, son expérience et sa rigueur, elle a été trahie. Usurpée. Invisibilisée. Volée.
Le responsable ? Vincent Hautain (prénom d’emprunt), lui-même styliste-modéliste. Un confrère qui connaissait donc parfaitement la valeur du travail fourni… et les limites qu’il a sciemment franchies.
L’histoire : quand un confrère s’approprie ce qu’il n’a pas créé
Tout commence lorsqu’un certain Vincent Hautain contacte Victoire Jolie pour une collaboration haut de gamme : création d’une série de tenues pour une cérémonie d’envergure. Il met en avant son réseau, évoque des connexions internationales, promet de la visibilité et des opportunités futures.
Victoire accepte, par professionnalisme et engagement. Elle s’implique de bout en bout :
- Conception des croquis,
- Choix des matières,
- Suivi de réalisation,
- Ajustements,
- Livraison des tenues finalisées.


Une partie des matières premières est même achetée à ses frais, sur indication directe de Vincent — qui lui promet un remboursement rapide. Remboursement qui n’a jamais eu lieu.
Et ensuite ? Le silence. Jusqu’au jour où la campagne sort.
La trahison : une appropriation publique, assumée, et documentée
Les visuels de la collection sont publiés sur les réseaux sociaux… puis sur le site web professionnel de Vincent Hautain.
Mais aucune mention de Victoire Jolie.
Pire : Vincent s’attribue publiquement la création des tenues, affirmant dans ses publications et interviews qu’il est à l’origine du concept, des croquis et de l’ensemble du processus créatif.
Il s’expose, se met en scène comme auteur exclusif de la collection. Une usurpation volontaire, qui dépasse le simple oubli : c’est une stratégie. Une réécriture délibérée de l’histoire.



Et Victoire détient les preuves :

- Croquis originaux signés,
- Fichiers sources,
- Échanges écrits,
- Captures d’écran,
- Photos des étapes de travail.

Ce que dit la loi : la création est protégée, même sans dépôt
En droit français, le droit d’auteur naît au moment de la création, sans nécessité de dépôt officiel.
Article L111-1 du Code de la propriété intellectuelle :
« L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. »
Cela signifie que Victoire, en tant qu’autrice de la collection, détient automatiquement les droits — y compris face à un confrère.
Le droit moral : inaliénable, perpétuel, et non négociable
L’élément central ici est le droit moral. Ce droit fondamental comprend notamment :
- Le droit à la paternité : être reconnue comme l’autrice de l’œuvre.
- Le droit au respect de l’œuvre : ne pas la voir modifiée, exploitée ou réinterprétée sans consentement.
- Le droit de divulgation : décider comment et quand elle est rendue publique.
- Le droit de retrait ou de repentir.
Le droit moral est inaliénable. Même en cas de cession de droits patrimoniaux (ce qui n’a pas été fait ici), Victoire devait être nommée comme créatrice.
Ce que Vincent a fait est donc non seulement une faute morale et éthique, mais aussi une infraction légale.
Une tromperie qui engage aussi le public
En s’attribuant le travail de Victoire, Vincent ne trompe pas seulement sa consoeur.
Il trompe :
- Les clients finaux,
- Les marques,
- Les photographes,
- Les acheteurs,
- Les spectateurs.
Il vend une illusion créative, une fausse signature. Il s’inscrit dans une démarche professionnelle mensongère, et fait courir un risque juridique à ceux qui l’emploient ou diffusent son travail.
Ce type d’usurpation peut entraîner des accusations de contrefaçon, de tromperie sur l’origine intellectuelle, voire de préjudice à l’image.
Comment se protéger dans ce type de collaboration
Avant la mission :
- Signer un contrat clair : rôle précis, cession éventuelle des droits, mention obligatoire de la paternité.
- Spécifier les modalités de remboursement des achats si le prestataire engage des frais pour le projet.
Pendant la mission :
- Conserver toutes les preuves : mails, croquis, photos, factures, échanges.
- Valider chaque étape par écrit.
Après la mission :
- Surveiller activement les publications.
- Réagir immédiatement à toute utilisation abusive ou omission de mention.
En cas d’abus : quels recours ?
Victoire Jolie, comme tout créateur lésé, peut :
- Envoyer une mise en demeure à Vincent Hautain.
- Faire appel à un avocat spécialisé en propriété intellectuelle.
- Demander réparation pour atteinte au droit moral, préjudice d’image, frais non remboursés.
- Porter plainte pour contrefaçon (article L335-2 du Code de la propriété intellectuelle).
⚖️ Sanction prévue :
Jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 300 000 € d’amende,
aggravés en cas de récidive ou d’exploitation commerciale frauduleuse.
En résumé : ce que vous créez vous appartient — et vous avez des droits
Cette histoire n’est pas un cas isolé. Mais c’est un exemple flagrant de ce qu’il ne faut pas accepter. Et une démonstration que le droit est du côté du créateur, même en l’absence de contrat formel.
Vous êtes styliste, illustrateur, modéliste, designer ?
- 👉 Ce que vous créez vous appartient.
- 👉 Votre nom ne peut pas être effacé.
- 👉 Votre œuvre ne peut pas être volée en silence.
Protégez-vous. Affirmez votre rôle. Faites respecter vos droits.
Même contre ceux qui partagent — sur le papier — le même métier que vous.
À propos des captures d’écran
Les extraits de publications présentés dans cet article sont utilisés uniquement dans un but éditorial et pédagogique. Tous les noms, photos de profil ou éléments identifiants ont été volontairement floutés ou retirés afin de protéger les auteur·es d’éventuelles réactions malveillantes.
Si vous êtes l’auteur·e d’un contenu cité et que vous souhaitez que votre nom apparaisse, n’hésitez pas à me le signaler : je peux l’ajouter avec plaisir.
Modèle de mise en demeure – Usurpation de création
[Nom Prénom du créateur]
[Adresse postale]
[Adresse e-mail]
[Téléphone]
À l’attention de :
[Nom et prénom du destinataire / entreprise]
[Adresse postale]
[Adresse e-mail professionnelle]
Fait à [ville], le [date]
Objet : Mise en demeure – Usurpation de paternité d’œuvre et atteinte au droit moral (Code de la propriété intellectuelle)
Madame, Monsieur,
Je me permets de vous adresser la présente mise en demeure concernant l’utilisation non autorisée de créations originales dont je suis l’auteur(e), à savoir [décrire brièvement l’œuvre concernée : croquis, vêtements, collection, etc.], réalisées dans le cadre de notre collaboration datée du [date de la mission / commande].
En effet, il apparaît que ces œuvres sont actuellement utilisées, publiées et diffusées, notamment via [site web, réseaux sociaux, catalogues, etc.], en violation manifeste de mes droits d’auteur, et plus particulièrement de mon droit moral à la paternité, garanti par l’article L121-1 du Code de la propriété intellectuelle.
Je vous rappelle que :
- La paternité d’une œuvre ne peut être ni cédée, ni ignorée ;
- L’auteur(e) d’une œuvre jouit du seul fait de sa création d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous (art. L111-1 du CPI) ;
- Le fait de se présenter comme l’auteur d’une œuvre dont on n’est pas le créateur constitue une atteinte grave à ce droit moral, passible de poursuites.
Par conséquent, je vous mets en demeure, sous huit (8) jours à compter de la réception de la présente :
- De cesser immédiatement toute diffusion ou présentation de l’œuvre en tant que vôtre ;
- De retirer les contenus litigieux de tous vos supports (site internet, réseaux sociaux, médias…) ;
- De publier une mention rectificative visible, reconnaissant mon rôle d’auteur(e) desdites créations ;
- De me verser le remboursement des frais engagés à votre demande et restés à ce jour impayés, à hauteur de [montant en euros], correspondant à [liste des éléments achetés si nécessaire].
À défaut de réponse satisfaisante dans le délai imparti, je me verrai contrainte d’engager toute procédure utile, y compris judiciaire, pour faire valoir mes droits et obtenir réparation du préjudice subi.
Je vous invite à considérer la présente mise en demeure avec toute l’attention qu’elle mérite.
Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.
[Signature]